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Blocage de l’A1 par les gens du voyage : la faillite de l’Etat régalien

Le blocage de l’autoroute A1 dans la Somme, durant quatorze heures, par une soixantaine de gens de la communauté du voyage, en toute impunité et même sans aucune réaction des forces de l’ordre, est une nouvelle illustration de la déliquescence de l’Etat dans ses fonctions régaliennes, cet État si coûteux et qui se mêle de tant de choses de notre vie. Car n’oublions pas que cette incapacité manifeste à garantir la libre circulation n’empêche pas le gouvernement de faire réprimer depuis cet été l’utilisation d’une oreillette dans sa voiture !

Voilà où nous en sommes. Un État fort avec les faibles, en l’occurrence les citoyens dont l’honnêteté est finalement considérée comme une faiblesse, et faible avec les forts, des délinquants dont l’intensité de la transgression est considérée comme une force. Attention, avec ce genre d’acceptations, ce sont les fondations mêmes de la démocratie qui sont menacées, ce qui constitue notre patrimoine collectif le plus précieux, celui de la civilité, de la responsabilité, de la justice.

Ce blocage de l’A1 et les dégâts commis par un groupe de gitans sans que l’Etat intervienne, rétablisse l’ordre et punisse les délinquants (c’est-à-dire assume ses missions de base, ses tâches essentielles qui justifient son existence), relèvent de la même triste logique que ce que j’avais constaté en juin dernier avec le blocage de l’entrée ouest de Cannes par des gens du voyage ou les barrages sur des autoroutes par diverses corporations au gré de leurs revendications.

A chaque fois, sur ordre du gouvernement (mais l’honnêteté intellectuelle conduit à dire que malheureusement cette faiblesse coupable n’est pas l’apanage de cet exécutif, même s’il pousse loin un manque de courage d’autant plus pathétique qu’il contraste cruellement avec les discours martiaux du chef du gouvernement), ceux qui devaient représenter l’autorité républicaine n’ont pas agi contre les fauteurs de trouble, barguignaient avec eux, se laissaient tancer, parfois insulter. Pire, comme maire je n’étais pas autorisé, dans le cas des caravanes immobilisées volontairement et illégalement sur la voirie communale pour faire un chantage au terrain, à faire évacuer par la police municipale les fauteurs de trouble.

Dans un autre registre mais dans ce même cadre de faillite de l’Etat régalien, nous n’avons pas eu de renforts de la police nationale cet été pour veiller à assurer l’ordre dans les quartiers de notre ville, notamment la nuit. C’est la première année et c’est un scandale, tant l’Etat abandonne ce qui est sa vocation et sa raison d’être, avec concrètement sur le terrain des patrouilles de la police municipale et un commissaire de la police nationale qui ont fait des prouesses avec les « moyens du bord ». J’ai assez tourné avec eux pour en témoigner.

Je vois dans tous ces abandons gouvernementaux la confirmation de ce que j’ai constaté depuis longtemps et que nous apprend un simple constat objectif, factuel, aussi bien dans le temps qu’en comparaisons avec les autres pays de l’OCDE : plus l’Etat prélève, par des impôts et des charges qui atteignent en France le record de 47 % des richesses produites sur le territoire national (PIB), plus l’Etat dépense, désormais 57 % du PIB, et au passage plus l’Etat est endetté, à hauteur de 100 % du PIB, plus il est bureaucratique, interventionniste, sclérosant pour la société, et parallèlement défaillant dans ses fonctions premières, régaliennes, de police et de justice.

Il faut que cela change et il faut y croire. Si je me suis engagé dans la vie publique – la politique pour dire clairement les choses, alors que rien dans mes origines et mon milieu ne m’y prédestinait, c’est d’abord bien sûr pour m’occuper de ma ville de Cannes que j’aime tant et pour laquelle je nourris de belles ambitions, mais c’est aussi pour ne pas accepter ce genre de situations telles que celles que je viens d’évoquer, parle que si les citoyens ne se réveillent pas et ne prennent pas leur destin en main dans le meilleur des systèmes possibles, celui de l’élection, alors les technocrates et autres bureaucrates qui confondent les modalités et les finalités, qui se noient dans leur prétentieux jargon aussi abscons a priori que politiquement correct et inopérant a posteriori, qui oublient les fondamentaux de l’autorité républicaine, de l’égalité devant la loi, du respect dû aux citoyens, des comptes à rendre aux contribuables, de la Liberté à protéger de ceux dont l’activité nuit aux autres et de l’arbitraire, quel qu’il soit, alors ces bureaucrates et technocrates ont gagné, et le déclin de le France est assuré pour longtemps, jusqu’à ce que le peuple se lasse et s’offre aux démagogues racoleurs, qui portent en eux l’effondrement du pays et le déshonneur.

Oui, cette histoire hélas vraie de blocage de l’A1 est révélatrice d’une façon de gouverner à bout de souffle. Non ce n’est pas inéluctable. Notre pays dépend de notre capacité de citoyens à affronter la réalité de la France dans le monde, à participer à une nouvelle façon de gérer la cité, à sauver la démocratie de ses deux ennemis mortels qui sont en elles, donc en nous, l’oligarchie technocratique auto reproductrice et la démagogie malsaine et destructrice.

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